Technique MotoGP : Nouveau brevet Aprilia sur un châssis à rigidité variable pour la RS-GP !

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En clôturant au moins provisoirement le volet des trois brevets déposés par Aprilia concernant l’aérodynamique des MotoGP, nous vous avions fait part d’une petite découverte dans un autre domaine…

Effectivement, à force de fouiller pour trouver les brevets eux-mêmes afin de les lire, on tombe parfois sur des choses plus intéressantes, voire extrêmement intéressantes comme c’est le cas pour le brevet WO2024028318A1 publié cette année 2024 par le déjà connu Marco De Luca associé cette fois à Germano Bergamo pour le compte de Piaggio.

Marco De Luca, vous connaissez déjà, un ingénieur passé chez Lamborghini, Mercedes AMG et McLaren avant de prendre en 2019 chez Aprilia la tête du département chargé de concevoir le châssis de la RS-GP, son développement aérodynamique, le refroidissement du moteur et des freins, le design du snorkel, de la boîte à air, du système d’échappement et du réservoir de carburant. Bref, une pointure !

Mais si 3 brevets avaient été déposés dans le domaine de l’aérodynamique de la bête, jusqu’à présent rien ne concernait le châssis pourtant assez original de la RS-GP, que nous avions pourtant dévoilé en exclusivité à plusieurs reprises. Le cadre des Aprilia (bien en aluminium, la version carbone n’ayant jamais été aperçue…) reprend en effet le concept inauguré par Suzuki, avec des supports-moteur boulonnés (aujourd’hui par 3 vis contre 5 sur la regrettée GSX-RR), et ce, dès 2017 (voir ici) puis à nouveau en 2022 dans une nouvelle version (voir ici).

Mais comme on peut le voir sur la photo suivante, alors que Suzuki pouvait changer la rigidité de son cadre en changeant les éléments boulonnés, chez Aprilia on a opté pour une autre solution, plus évoluée : relier lesdits supports au cadre proprement dit par des tirants également appelés jambes de force. Mais des tirants “intelligents”…

Soyons honnêtes, le sujet est tellement sensible que certaines de nos photos (pas celle-ci) étaient remontées jusqu’à Noale, engendrant des coups de téléphone pour nous demander gentiment de les retirer, sous peine de nuire aux imprudents mécaniciens, ce que nous avions évidemment fait. Mais en ce début de saison 2024, le brevet concerné rend la chose publique, et nos objectifs ne manqueront pas de se régaler à la première occasion…

Le brevet Aprilia éclaire quelques subtilités techniques du MotoGP :

 L’état de la technique comprend les cadres de motos en aluminium ou en matériaux composites pour répondre aux besoins de légèreté et de rigidité. Les cadres de motos ont généralement une forme en « U » ou en « O » pour relier la colonne de direction au bras oscillant de la roue arrière. Les cadres permettent également l’ancrage du moteur de propulsion. En général, le moteur est installé directement sur le châssis.

Dans certains châssis, le moteur est installé sur le châssis au moyen de supports pour des raisons de rigidité. Les supports sont reliés au châssis au moyen de moyens de connexion et le moteur est installé sur les supports. De cette manière, la rigidité du cadre peut être ajustée et la rigidité longitudinale et latérale peut être optimisée. En pratique, la rigidité des supports est moindre, ou en tout cas différente, de celle du cadre et permet de ne transférer que partiellement les torsions et les mouvements typiques du moteur au cadre.

Dans ce dernier type de châssis, les supports sont conçus pour présenter une rigidité longitudinale suffisante pour éviter le phénomène dit de « fermeture du châssis », c’est-à-dire un avancement excessif du moteur par rapport à la colonne de direction lors du freinage. Ce phénomène est encore plus perceptible sur les motos de course, notamment celles du MotoGP. Dans ces motos, les cadres sont extrêmement affectés par les déformations provoquées par le freinage, qui sont bien plus puissantes que celles des motos normales.

 Pour résoudre ce problème de “fermeture du cadre” lors du freinage, les supports moteur sont généralement surdimensionnés, mais cela entraîne un poids plus important et une perte de performances, en termes de rigidité, dans les virages, à mesure que le cadre devient plus rigide. en déformations longitudinales, mais aussi plus rigide en déformations latérales.

Les inconvénients susmentionnés de l’art antérieur sont maintenant résolus par un cadre de moto, qui comprend un corps principal s’étendant dans une direction longitudinale et une paire de supports reliés au corps principal et configurés pour supporter au moins partiellement un moteur, dans lequel ledit cadre comprend une paire d’entretoises configurées pour être rigides en compression et libres en traction. Chaque entretoise est reliée à une extrémité avant au corps principal et à une extrémité arrière à l’un desdits supports. Le cadre ainsi conçu présente une plus grande rigidité. Lors du freinage, la masse du moteur a tendance à avancer en déchargeant son poids en partie sur les supports et en partie sur la jambe de force. A l’inverse, lors de l’accélération, la jambe de force est libre de s’allonger et le moteur ne décharge sa masse que sur les supports.

De cette manière, la paire de jambes de force permet d’absorber les charges de compression agissant sur le châssis principal, tout en restant inutilisée et sans importance lorsque des charges, différentes de celles de compression, agissent. Ces charges de compression sont principalement celles qui se développent lors d’une décélération et d’un freinage brusques de la moto, et ont tendance à “fermer” le corps principal du cadre, c’est-à-dire à générer un moment cinétique dans le sens des aiguilles d’une montre sur la figure 2. La fonction des jambes de force est d’augmenter la rigidité des supports lors du freinage et d’évacuer les forces principalement sur la partie du corps principal qui est proche de la colonne de direction. De cette manière, la moto est plus stable lors du freinage, permettant au pilote de entrer dans un virage d’une manière plus fluide.

En même temps, la paire de jambes de force est “transparente” dans les autres conditions de fonctionnement de la moto, par exemple en virage ou en accélération, permettant une déformation labile du châssis et des supports. De cette façon, on assure une plus grande flexibilité du cadre, ce qui est nécessaire surtout dans la phase d’accélération ou de virage. La flexibilité du cadre permet plus d’adhérence des pneus, et donc plus de traction en accélération en sortie de virage.

En schématisant à l’extrême, le cadre est bien rigide au freinage, mais souple en virage et à l’accélération. Voilà comment Aprilia vient d’inventer le cadre à rigidité variable.

Deux sortes de jambes de force ont été réalisées par Aprilia en MotoGP.

Aprilia MotoGP

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