Grand Prix de Chine – La longue marche de Guanyu Zhou

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Débutées le 20 mars 2022 à Bahreïn, les tribulations de Zhou Guanyu connaîtront un nouvel épisode cette fin de semaine après une interminable croisière en 48 étapes. Il en a vu des circuits, affronté des virages, mais aucun qui ne ressemble au Circuit international de Shanghai. C'est ici même, le 26 septembre 2004, que le destin lui avait donné une première fois rendez-vous. Il était alors âgé de cinq ans.

« Il n'y avait rien autour du circuit, et encore moins de promotion de l'évènement, se remémore-t-il. Les billets étaient distribués par les constructeurs automobiles, et mon père a eu la chance d’en obtenir deux. J’étais dans les tribunes juste avant le virage 1, je regardais passer les voitures et j’avais ce sentiment bizarre au fond de moi. C'est à ce moment que j'ai voulu devenir pilote ! »

Zhou est frappé en plein cœur ce jour-là. Chaque image se grave dans sa mémoire d'enfant, et plus rien ne sera jamais capable de l'effacer. Il doit patienter trois ans avant de pouvoir débuter en karting, mais c'est en Angleterre, à Sheffield, où la famille s'installe en 2012, que sa carrière prend forme. Il a maintenant 13 ans. « Je me souviens du premier championnat d'importance que j'ai remporté (Rotax Max Euro Challenge en 2013. Ndlr), il n’y avait pas d’hymne national ni de drapeau chinois pour m'accompagner sur le podium, s'amuse-t-il à rappeler. Personne ne pouvait alors imaginer qu’un jour il y aurait un pilote chinois sur la scène internationale, et encore moins en Formule 1 ! »

Ce sont les prémices de la longue marche qui l'attend, mais il n'en a pas encore conscience. Le passage à la monoplace se fait en 2015 via le championnat italien de F4, suivi par trois années de F3. « Trois saisons assez difficiles à cause de choix de voitures loin d'être idéaux et qui ont suscité des doutes, regrette-t-il. Le passage à la F1 était alors inimaginable, aussi parce que la concurrence était tellement féroce. » Il doit ainsi attendre 2019 pour rejoindre les rangs de la F2, année où il est incorporé à la Renault Sport Academy bientôt rebaptisée Alpine Academy en 2021. Au Grand Prix d'Autriche de la même année, au volant de l’A521, il participe aux EL1 et devient le deuxième pilote de Chine continentale à évoluer dans un week-end de Grand Prix après Ma Qing Hua (EL1 du GP de Chine 2013 avec Caterham. Ndlr). La révolution est en marche !

Shanghai Express

Le périple débute ainsi à Bahreïn en 2022 sous les meilleurs auspices, avec un point. Hélas, alors que cette entrée en matière laisse augurer d'une voie royale, c'est une longue traversée du désert qu'il va devoir affronter. L'Alfa Romeo C42 n'est pas au niveau, pas plus que la C43 de 2023. Les moments de satisfaction sont aussi rares que les points marqués, 12 en deux saisons. Au mieux, peut-il se réjouir du fait qu'il n'a pas à rougir de la comparaison avec son réputé équipier Valtteri Bottas. Depuis le début de l'actuelle saison, la C44 de l'écurie de Hinwil, rebaptisée Stake F1, offre une nouvelle fois des perspectives limitées même si elle va bénéficier à terme de la montée en puissance d’Audi au sein de l'écurie helvétique dont elle est désormais propriétaire. Mais cela est une autre longue marche à laquelle il ne participera sans doute pas…

© Sauber

Pour l'heure, Zhou Guanyu ne tire pas de plan sur la comète, et préfére se concentrer sur son quotidien. D'abord reporté puis annulé en 2020 en raison de l’épidémie de Covid-19, le Grand Prix de Chine encore absent les trois années suivantes fait enfin son retour. « J'en ai la chair de poule », se confie le pilote chinois. Même si le voyage prendra encore des mois ou des années, c'est un aboutissement qui l'attend à Shanghai. « C’est la chose que j’attendais le plus parce qu'il n'y avait plus eu de Grand Prix de Chine depuis que je cours en F1, et parce que c'est un rêve qui devient réalité, souffle-t-il. Celui de ce petit garçon de 2004. J'ai beaucoup attendu ce moment depuis tout ce temps, spécialement depuis ces deux dernières années. J’ai dû me battre pour disputer cette course à domicile, et c’est enfin le cas. C’est vraiment excitant de penser à tous ces gens qui vont être là, à la foule qui va être enthousiaste. »

Et la Chine s'éveilla

Il est vrai que depuis 2004, la Chine s'est éveillée. Une marque comme Ferrari, qui n'avait pas à l'époque la moindre concession dans l'empire du milieu à l'exception de Hong Kong, en compte vingt-cinq aujourd'hui, ce qui témoigne de l’importance de ce marché pour un grand nombre de sociétés impliquées en F1. Un quart des voitures qui sortent des chaînes de production de Maranello sont désormais vendues en Asie, la Chine étant le principal acteur. Idem pour Aston Martin ou McLaren. Ce n’est pas le seul changement puisque les entreprises chinoises à croissance rapide sont désormais désireuses d’atteindre les marchés internationaux, et pas seulement les marques automobiles comme Geely, MG et BYD (leur actualité est traitée sur Mobiwisy.fr). C'est une opportunité supplémentaire pour la Formule 1 qui, elle aussi, voit le bout de sa longue marche entreprise avec ses partenaires.

La sienne, Zhou Guanyu ne l'a pas faite seul non plus. À chaque étape, Graeme Lowdon a été là. « Le plus dur fut de l'amener en F1, et ce qui m'a fait le plus plaisir à Bahreïn en 2022 lors de la course d'ouverture, c'est de constater qu'il s'est senti aussitôt chez lui en F1, explique le manager britannique en amont de ce qui est pour lui aussi un évènement majeur. S'il y a eu, lors des premiers mois, quelques discussions concernant sa légitimité, elles n'existent plus depuis longtemps ! Il n'est pas en F1 grâce à son passeport, mais à son talent. La chance n'a pas souvent été de son côté, et les résultats ne reflètent pas assez la qualité de ses courses. Il y a, en Chine, un intérêt croissant pour la F1 en général, et pour lui en particulier. La progression est spectaculaire ! Les fans découvrent la F1, et c'est plus difficile de comprendre ce sport quand le classement ne reflète pas la performance. Zhou pourrait aussi montrer de la frustration, mais ce n'est absolument pas le cas. Il sait que ça viendra. »

Que sa longue marche fera de lui un Grand Timonier de la F1 ?

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